
Députée et ministre pour la première fois, Jill McKnight se dit déterminée à régler les dossiers des temps d’attente, des besoins et de l’itinérance des vétérans. Photo : David Kawai.
La ministre d’Anciens Combattants Canada (ACC), Jill McKnight, admet que, avant de devenir députée et ministre à la suite des élections fédérales du 28 mars, sa vision des vétérans était complètement différente de celle qu’elle a décrite dans son entrevue avec Sage, à peine quelques mois après le début de son mandat.
« En grandissant, je pensais à des personnes comme mes grands-pères qui avaient servi, ou aux individus que je voyais participer au défilé du jour du Souvenir. Il s’agissait généralement de vétérans un peu plus âgés », explique Mme McKnight. « Aujourd’hui, nous savons que la moyenne d’âge des personnes quittant les Forces armées canadiennes se situe autour de la mi-trentaine. C’est très différent de la vision que j’avais, plus jeune. »
Alors qu’elle vient tout juste d’être élue députée et qu’elle passe du monde de l’entrepreneuriat à celui du ministère ACC, les délais d’attente pour les services restent une source de mécontentement chez les vétérans. Le ministère s’est fixé comme objectif de traiter les demandes d’invalidité dans un délai de 16 semaines. Toutefois, en 2023 et en 2024, il n’a respecté cette norme que dans 69 % des cas. L’objectif précédemment annoncé était de respecter ce délai dans 80 % des dossiers. La ministre confirme que l’objectif demeure bel et bien 16 semaines.
« C’est là-dessus qu’il faut concentrer nos efforts », déclare Mme McKnight.
« Je sais que les Canadiens veulent que nous fassions mieux pour nos vétérans. Je veux m’assurer que les changements que nous apportons sont ceux qui nous permettront d’y arriver. Et je comprends aussi que, lorsqu’il y a des retards, cela crée des difficultés pour les vétérans qui vivent dans la douleur ou la souffrance. C’est probablement ce qui me préoccupe le plus en ce moment, car je veux vraiment qu’on mette les gens au premier plan. Je veux aussi m’assurer, cependant, que nous le faisons de manière à offrir à chaque vétéran une attention personnalisée. »
Le gouvernement libéral a récemment annoncé un plan visant à dépenser 2,6 milliards $ pour le recrutement et la rétention. Cela s’inscrit dans un plan de dépenses de 9 milliards $ et il s’agit du plus important engagement de dépenses en personnel depuis la Seconde Guerre mondiale.
Lorsqu’on lui demande si cet engagement comprend un plan pour s’assurer que les militaires nouvellement recrutés sont pris en charge à leur libération ou à leur retraite, Mme McKnight, qui est également ministre associée de la Défense, répond que c’est le cas.
« Si nous recrutons quelqu’un, nous devons lui montrer que nous serons là pour lui à long terme — c’est un investissement à long terme dans les gens », opine-t-elle. « Je ne pense pas pouvoir trop insister sur l’importance de ce point. Ces personnes protègent notre possibilité de vivre la vie que nous vivons aujourd’hui. Et c’est vraiment d’une portée immense. Aussi, quand nous recrutons de nouveaux membres pour les Forces armées canadiennes, ce sont de futurs clients d’ACC. »
Le traitement des femmes vétéranes — une priorité pour Retraités fédéraux et un engagement illustré par le rôle déterminant de l’association dans l’établissement du Réseau de recherche et d’engagement des femmes vétéranes — est une priorité pour Mme McKnight. En 2024, un rapport du Comité permanent des anciens combattants intitulé Plus jamais invisibles. Les expériences des vétéranes canadiennes a formulé 42 recommandations pour améliorer la vie de celles-ci. Et le gouvernement a fait des progrès sur les 42 recommandations, affirme Mme McKnight.
« Nous venons de souligner le premier anniversaire du rapport et des recommandations, et j’ai pu rencontrer une délégation de femmes vétéranes ce jour-là », souligne-t-elle, ajoutant que certaines de ces recommandations impliquent le ministère de la Défense nationale. « Nous devons également considérer ce rapport comme un document évolutif, parce que ce n’est pas quelque chose qu’on fait une fois pour toutes. Des choses vont continuer à apparaître. »
La création du Forum des femmes et du Conseil des vétéranes sont deux ajouts précieux pour la collecte continue de renseignements, souligne-t-elle.
Au sujet de l’itinérance des vétérans, qui sont deux à trois fois plus susceptibles d’en faire l’expérience que la population générale, ainsi que des femmes qui sont 4,4 fois plus susceptibles d’être sans-abri si elles ont subi des traumatismes sexuels en milieu militaire, elle déclare : « Un vétéran sans-abri, c’en est un de trop ».
Pour lutter contre l’itinérance chez ses clients, elle affirme que son ministère doit établir des liens avec eux et trouver des solutions de logement pour eux, peut-être par l’entremise de l’initiative novatrice et humaniste Logement d’abord. Mais ce programme cible la population générale, pas seulement les vétérans. Il a été lancé en 2017 et le problème de l’itinérance persiste.
« Je pense que les mesures que nous pouvons prendre consistent à entrer en contact avec ces personnes et à trouver un logement qui répond à leurs besoins. Cela me donne l’occasion d’en parler avec mes collègues du cabinet. C’est en travaillant ensemble que nous pouvons apporter des changements significatifs. »
Une mesure préventive importante est un fonds d’urgence auquel les vétérans peuvent avoir accès si un besoin imprévu surgit et qu’ils ne peuvent pas payer leur hypothèque ou leur loyer. « Il y a en fait un programme qui permet [aux vétérans] d’avoir un accès immédiat aux ressources pour répondre à ce [besoin], parce que nous ne voulons pas que quelqu’un vive une expérience qui va le pousser dans la rue, n’est-ce pas? »
Interrogée sur les objectifs de son portefeuille, la ministre dit qu’elle veut faire de la vie après le service une priorité et qu’elle a hâte d’aider les vétérans, grâce à la Stratégie nationale d’emploi pour les vétérans.
« L’une des choses qui m’enthousiasme beaucoup, c’est de créer des liens avec les vétérans d’aujourd’hui qui quittent les Forces armées canadiennes pour entamer leur vie après le service — et [d’explorer] les pistes pour les aider à réussir pleinement leur transition vers le monde des affaires, ainsi que [de voir comment] nous pouvons intégrer leurs compétences et métiers au marché du travail. »
La reconnaissance des vétérans est aussi une priorité. Enfin, comme elle l’a mentionné, elle souhaite bâtir et renforcer la relation entre son ministère et celui de la Défense nationale. Son titre de ministre associée illustre clairement cette ambition.
« Nos deux ministères travaillent vraiment main dans la main », affirme Mme McKnight. « Je vois donc une excellente occasion de collaborer et de renforcer cette synergie. Le ministre [de la Défense] [David] McGuinty est très disposé à collaborer. »
Mme McKnight vient du monde des affaires. Elle est diplômée en commerce avec une spécialisation en entrepreneuriat de l’Université de Victoria. Elle a travaillé avec ses parents dans leur boutique de vêtements pour femmes, ainsi qu’avec le marché du village de Ladner, ce qui lui a permis de travailler avec des artisans et des producteurs locaux.
Juste avant de se présenter aux élections de 2025, elle occupait le poste de directrice générale de la Chambre
de commerce de Delta, en Colombie-Britannique, après avoir occupé le poste de présidente bénévole pendant cinq ans.
Elle est également une bénévole passionnée au sein de plusieurs organismes, dont la Ladner Business Association, la Fondation de l’hôpital de Delta, la Fondation du cancer de la Colombie-Britannique et Dress for Success.
Habituée aux distinctions honorifiques, elle a reçu la Médaille du couronnement du roi Charles III, la Médaille du jubilé de la Reine ainsi que, en 2019, le titre de bénévole de l’année à Delta.
Ses deux grands-pères, un oncle, le grand-père et l’arrière-grand-père de son mari ont servi dans l’armée. L’un de ses grands-pères a été déployé à l’étranger pendant la Seconde Guerre mondiale et l’autre était en poste au Canada.
Cette année marque le 80e anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale et les commémorations se poursuivent partout au pays, tout au long de l’année 2025.